mardi 30 juillet 2013

Le Retour de la Revanche du Rectorat

Souvenez-vous, c'était il y a (à peu près) trois ans : sur liste d'attente pour une bourse de thèse avec monitorat, j'étais écartelée sur le grill en me demandant s'il fallait que je me signale au rectorat de Versailles ou que j'attende en envisageant de me financer potentiellement pendant un an en vendant des allumettes à tous les coins de rue.

Un contrat doctoral plus loin, mes capacités à me coller malgré moi dans des situations impossibles se confirment.

Ceux qui me suivent sur Twitter le savent déjà : j'ai eu un poste d'ATER. Pas à Nanterre, mais en région parisienne, en latin et à temps plein. Je comptais faire un billet sur combien j'ai été heureuse à Nanterre et le pincement au coeur que j'ai eu en me disant que je ne travaillerais plus là l'an prochain, mais aussi sur combien j'étais  également contente d'aller voir ce qui se passe ailleurs et de respirer un peu d'air nouveau, d'autant que la nouvelle équipe où je suis partie pour m'intégrer a l'air aussi sympathique et dynamique que l'ancienne.

Et puis j'ai déménagé, j'ai eu des problèmes avec mes anciens propriétaires (dont je ne suis toujours pas débarrassée), j'ai eu beaucoup de travail, bref : j'avais un super sujet de note de blog et, à force de me dire que j'avais encore le temps de l'écrire, j'ai fini par ne jamais le faire.

C'est mal.

Mais aujourd'hui, j'ai à nouveau des choses à raconter, car tout ça est peut-être en péril, à cause d'une histoire de date et, pour une fois, de mon niveau d'angoisse étonnamment bas.

Après avoir appris que j'avais ce poste d'ATER (et mesuré la chance que j'avais de l'avoir), j'ai été invitée à la réunion de fin d'année du département où je devrais travailler l'an prochain et j'ai rencontré les responsables administratifs de l'UFR, qui m'ont dit qu'ils n'avaient pas encore eu de confirmation officielle de l'université, mais qu'ils me contacteraient dès que ce serait le cas.

Le temps passe et je me rends compte que, contrairement à presque tous les autres dossiers de candidature que j'ai déposés, celui qui a été retenu ne comportait pas de formulaire de demande de détachement.

Le point Education nationale

Je suis agrégée. Quand on a l'agrégation, on doit, l'année d'après, faire une année de stage, avant d'être titularisée. Dans mon cas, j'ai obtenu tout d'abord un report de stage pour fin de scolarité à l'ENS, puis une mise en disponibilité pour exercice des fonctions de doctorante contractuelle avec mission d'enseignement, ce qui veut dire que l'Education nationale a considéré que j'accomplissais mon stage pendant mes trois ans de monitorat. A la fin de mon contrat doctoral, c'est-à-dire maintenant, j'ai donc été considérée comme titularisée et j'ai dû participer aux divers mouvements inter- et intra-académique. Pour être ATER, il me faut désormais demander mon détachement au rectorat.

Fin du point Education nationale

Je me suis donc mise en Quête, sur le site du rectorat, d'informations pour savoir comment demander à être détachée comme ATER. J'ai trouvé des pages sur "Vous pouvez être détaché pour exercer des fonctions d'ATER", suivies de "ATER, sa vie, son oeuvre, pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien", des pages sur "Quand, comment, pourquoi être détaché lorsqu'on est CPE et autre type de personnel non enseignant", des pages sur "Vous venez d'être titularisé dans notre académie ? félicitations !" et les pages carrières m'ont orientées vers des concours internes, des promotions au mérite et une cellule d'aide psychologique.

J'ai donc élargi mes recherches et trouvé que les dates limites de Paris et Versailles étaient mi-juillet. Je me suis dit que ce devait être la même chose pour Créteil et, comme on était presque fin juin, je ne me suis pas inquiétée. J'ai aussi pensé qu'il valait mieux que j'attende d'avoir un papier officiel de ma nouvelle fac pour envoyer ma demande, histoire de la motiver sérieusement. J'ai donc attendu d'autant plus tranquillement que Altaïr m'avait fait miroiter un envoi de contrat.

C'est là où mon radar à emmerdes aurait dû se déclancher.

Radar

(Bip ! bip ! je sens approcher une grosse emmerde ! ; photo par BenFrantzDale ; source : FlikR)

Il a commencé à biper lorsque j'ai reçu un mail de la responsable du service du personnel enseignant de la fac, sur le thème : "Dites, vous ne nous avez toujours pas retourné votre acceptation officielle du poste". A quoi j'ai répondu : "J'aurais bien aimé, mais je n'ai rien reçu." Nouveau mail : "Ah oui, pardon, désolés, on a oublié de vous l'envoyer." On était le vendredi 4 juillet.

Munie du fameux papier en format pdf, j'ai passé le reste de la journée à essayer désespérément d'avoir quelqu'un au téléphone au rectorat. De guerre lasse, j'ai fini par envoyer un mail à leur service du personnel enseignant. C'est que, entre temps, j'avais reçu un sms m'annonçant que j'étais nommée dans un collège n'ayant aucun rapport avec les zones de remplacement que j'avais demandées (mais desservi par le RER B, Dieu merci), puis un coup de fil d'une prof de français enseignant là-bas, qui voulait prendre contact et parler services d'enseignement.

Lundi 8, administrativement aux aurores, nouvelle série de coups de fils. Personne au département dont je dépends, personne au standard du service du personnel enseignant, mais, en appelant, en désespoir de cause, le standard central du rectorat, j'ai réussi à remonter toute la ligne et à avoir quelqu'un. J'ai alors appris deux choses : 1) la personne responsable de moi n'était pas là ce jour-là ; 2) la date limite, c'était fin juin, donc j'étais hors délais et ma demande dépendait de l'avis du recteur. J'ai tout de suite écrit et posté la lettre. Le lendemain, je reçois un mail de ma gestionnaire me demandant de tout envoyer au plus vite et me confirmant que tout dépend de la rectrice.

Le temps passe. Au bout d'une semaine, j'envoie un mail à ma gestionnaire pour m'assurer qu'elle a bien ma nouvelle adresse, savoir si ma demande est arrivée et si elle peut me donner une idée de la suite qui va lui être donnée. Aucune réponse. Pendant ce temps, la fac m'appelle parce qu'ils ont besoin d'une copie de mon contrat doctoral pour faire mon contrat d'ATER ; quand je leur parle du détachement, ils n'ont pas l'air très au courant des formalités et des délais. "Mais je vais quand même vous faire votre contrat comme si tout allait bien, on ne sait jamais." Rassurant.

Chéri et moi finissons par partir dans le sud de la France, en prêtant notre appartement à des amis vivant aux Etats-Unis. Je demande à ma copine de relever le courrier, en surveillant tout particulièrement les lettres du rectorat et de m'appeler immédiatement si quelque chose arrive.

Une autre semaine passe. Depuis mon nouveau Lieu de Réclusion Pour Ecrire ma Thèse, j'essaie d'appeler le rectorat pour savoir où ça en est. C'est simple : le matin, où que j'appelle, ils ne répondent pas et, l'après-midi, le téléphone est décroché et sonne donc perpétuellement occupé.

Une semaine plus tard, hier donc, coup de fil de ma copine : la lettre du rectorat est arrivée ; mon détachement est refusé à cause des besoins en prof de lettres classiques dans l'académie et du caractère tardif de ma demande.

Seven Hells.

A un jour près, mon humeur était en parfaite adéquation avec l'orage qui nous est tombé dessus dans la nuit de dimanche à lundi.

orage 042

(Braoum. Photo par RomainSeaf ; source : FlickR)

J'ai donc passé la soirée à écrire des mails. Aux directeurs de département et d'UFR de ma fac. Au président du ma section CNU, qui enseigne dans ma fac. A Chef, qui en est le vice-président, pour savoir s'il avait une idée des recours possibles. A ma future collègue de latin dans ma nouvelle fac, pour la mettre au courant en espérant ne pas trop lui polluer ses vacances. A la Société des Agrégés, pour bénéficier de leur expérience dans la gestion de ce genre de problèmes.

Mon humeur était "Eh bien, puisque c'est comme ça, quoi qu'il arrive, je prends mon poste d'ATER. Ils n'auront qu'à me déclarer en abandon de poste et me faire perdre mon agrégation. Ma tête fonctionne remarquablement bien, j'ai en général un bon contact humain et je parle couramment quatre langues, on va voir si je ne trouve pas un boulot avec ça, le temps de postuler pour être MCF !"

Puis les mails ont commencé à arriver. Globalement, tout le monde a dit que c'était étonnant et qu'ils allaient contacter les personnes qu'ils connaissaient et voir ce qu'ils pouvaient faire pour arranger ça. Le plus intéressant a été le coup de fil de la Société des Agrégés : j'ai en effet appris que, certes, j'aurais dû avertir le rectorat de mon intention de postuler comme ATER dès mon affectation inter-académique, mais que ce n'était pas à moi d'envoyer la demande, mais à l'université qui m'avait recrutée. Gros blanc, parce qu'on m'a quand même tapé sur les doigts de ce côté-là, sur le thème "Mais enfin, comment est-il possible que vous ne les ayez pas contactés tout de suite sans attendre, tous les autres l'ont fait, il n'y a d'habitude aucun problème !"

Ma principale erreur, à mon avis, a surtout été de ne pas m'être démenée pour savoir comment ça allait se passer, ce qu'il fallait que je fasse, etc. et aussi de ne pas avoir eu l'idée de demander tout de suite à l'université quelles étaient les démarches à accomplir, parce que tout le monde est parti du principe que je savais ça et personne ne m'a rien dit. Mais comment peut-on poser une question à laquelle on ne pense pas, parce qu'on n'a pas (encore) l'expérience de ces mic-macs administratifs ?

Je suis donc à nouveau en attente. Des démarches faites par les autres. De la demande de recours gracieux que j'ai envoyé à la rectrice, sur les conseils de la Société des Agrégés, qui l'enverra avec une lettre de soutien. Sauf qu'à présent, le rectorat est fermé jusqu'au 20 août et que, quand il rouvrira, moi, je serai encore en Italie.

Hé ! Free ! tu me fais un prix sur les communications transnationales ?