mercredi 12 septembre 2012

Les Journées Découvrir l'Antiquité à l'ENS Paris

Cet après-midi, j'étais à la réunion de rentrée des Journées Découvrir l'Antiquité à l'ENS Paris. Kezacò ? Des élèves et anciens élèves antiquisants de l'ENS Paris ont commencé à monter, depuis quelques années, des journées destinées à faire découvrir l'Antiquité à des élèves de collèges et lycées, à travers un thème unique. Les premières journées portaient sur la tragédie grecque et Homère et ses épopées, puis elles se sont élargies à la comédie, l'éloquence, etc.

J'y ai participé l'année dernière : depuis le temps que je râlais en sourdine sur le thème "Ouais, l'Antiquité, comme d'habitude, c'est toujours la Grèce, sont pénibles ces hellénistes !", quand la journée sur l'éloquence romaine s'est montée, mes copains m'ont regardée d'un air ironique et, évidemment, j'ai dit oui.

Je ne l'ai vraiment pas regretté. Le principe est d'organiser divers ateliers autour du même thème et de faire tourner des groupes d'élèves entre eux. Certaines journées invitent aussi un conférencier ; un atelier commun est souvent prévu en fin de journée. Pour vous donner une idée, la celle sur l'éloquence romaine était organisée comme suit :

- matin : quatre ateliers ("Cicéron"," L'actio", "A l'école de la rhétorique" et "Les lieux de l'éloquence sur le forum républicain")
- après-midi : un seul atelier, où les élèves devaient réutiliser ce qu'ils avaient vu le matin, en composant un discours "à l'antique", à partir d'un argument tiré de Sénèque le Père ; les uns font le discours pro, les autres le discours contra.
- fin d'après-midi : atelier cinéma, avec des extraits du "Jules César" de Mankiewicz, de la série "Rome" et de "Gladiator".

L'atelier de l'après-midi était un peu particulier, au sens où c'était la première fois qu'on montait quelque chose de ce genre. Mais les élèves ont adoré, quel qu'ait été leur niveau : ils se sont franchement creusé la tête pour trouver des arguments et ont déclamé leur texte comme des pros, en reproduisant les gestes des orateurs romains ! Les prochaines journées voudraient reprendre et développer cette idée.

J'en suis ressortie crevée, mais bien contente, et c'était apparemment aussi le cas des élèves et des profs participants.

Cette année, les Journées se renouvellent (presque) complètement. La journée sur l'éloquence romaine est maintenue, mais quatre autres thèmes seront aussi mis en place : les Argonautes, l'historiographie antique (la manière d'écrire l'histoire dans l'Antiquité) et deux autres, dont les thèmes devraient être définis d'ici à la fin du mois (on a parlé d'une journée sur les rapports entre la Grèce et Rome et d'une journée sur l'Orient, mais ce n'est pas définitif, ça risque de changer). Elles auront lieu en février et mars.

Si vous êtes profs et que ça vous intéresse, n'hésitez pas à vous rendre sur le site de l'association pour avoir plus d'informations. Les inscriptions seront ouvertes seulement pendant la semaine du 6 au 12 octobre (sinon, on a beaucoup trop de candidatures), plutôt aux classes d'antiquisants, mais pas uniquement, quel que soit leur niveau ; nous privilégions les gens qui ne sont jamais venus et ceux qui viennent des établissements les moins favorisés (les critères de sélections sont présentés en détail ici).

Si vous êtes élèves de collège ou de lycée et que vous avez envie de venir, parlez-en aussi à vos profs ! C'est vraiment une journée sympa, où vous apprendrez plein de choses et pourrez réutiliser de ce que vous voyez en cours ! Sans compter que l'ENS est un cadre plutôt agréable, en particulier lorsqu'on peut déjeuner dans la cour aux Ernests !


lundi 10 septembre 2012

La minute féministe

Pour ceux qui n'ont pas à supporter mes pleurnicheries sur Twitter, Chéri est en train de boucler son M2. Plus ou moins au dernier moment, comme d'hab' (pas de raison pour qu'il procède différemment de quand il doit rendre une partition). Du coup, je corrige sans qu'il ait eu le temps de se relire au moins une fois, ce qui, au bout de deux semaines de ce régime (y compris pendant le colloque auquel je participais fin août), a fini par me rendre à peu près aussi grognon qu'en décembre, quand je me coltine quatre-vingts articles d'étudiants de L1, pleins de fautes d'orthographes et que j'ai très envie de renvoyer sans les avoir lus, après avoir seulement écrit en gros, gras et rouge sur la première ligne : "CHARABIA NOM D'UN KANGOUROU !!!!" (remarquez, je devrais peut-être). Ce n'est pas qu'il écrive mal, mais son style est une sorte de mixte entre Cicéron, Tite-Live et Proust ; son record étant (pour le moment) une phrase de douze lignes, you can call me Virgulator et Reformulator.

Tout ceci me fait donc penser très fort à ces petites mains citées dans les remerciements, au début de thèses ou d'ouvrages de mille pages : "Je remercie mon Directeur Adoré Chéri d'Amour, dont l'Auguste Intelligence a éclairé mon Chemin, etc., etc. Maman, papa, yop" (je vous rassure, les remerciements de Chéri à mon égard sont tout ce qu'il y a de plus choux). J'ai, en particulier, une pensée pour ces femmes de chercheurs qui, à l'époque où les ordinateurs et les imprimantes n'existaient pas, se tapaient : 1) le déchiffrage de l'écriture manuscrite dégueulasse de leur Cher Mari ; 2) la tape à la machine de tout ce sabir à peine compréhensible ; 3) la re-tape à la machine etc., etc., parce qu'il avait eu une autre idée et qu'il voulait ajouter quelque chose ; 4) les courses ; 5) la cuisine ; 6) le ménage ; 7) la vaisselle ; 8) les enfants ; 9) le reste de la famille à gérer (genre moi ces deux dernières semaines, les points 1), 2), 3) et 8) en moins).

Ces femmes-là, on n'en parle jamais, on les croise rarement, sauf, parfois, en fin de colloque/réunion/séminaire du samedi matin ou du vendredi soir et, plus souvent, dans lesdits remerciements : "Je remercie ma tendre épouse, pour son soutien, sa présence, etc., etc." En fait, c'est à elles qu'on devrait décerner un titre.



(Bien sûr, ça marche aussi pour Chéri, qui, quand il n'est pas plongé dans son M2, dossier pour un contrat doctoral, partition à rendre pour avant-hier, partition de mille pages à travailler au piano pour un concert après-demain soir (rayer la mention inutile), supporte ma monomanie, mes crises d'humeurs, mes petits cris aigus de chasseresse de manipulations historiographiques et mes questionnements existentiels de type "Mais pourquoi Chef n'a toujours pas répondu à mon mail ??? Ça fait pourtant au moins deux jours que je le lui ai envoyé !!!!" Je vous rassure, si j'en sors vivante, mes remerciements pour lui seront choupis.)

lundi 3 septembre 2012

Les bonnes résolutions, c'est mauvais pour la santé

Re-voilà septembre, la rentrée et ses bonnes résolutions à la pelle ! Répondre tout de suite aux mails des étudiants, ne pas faire l'autruche et corriger leur prose au fur et à mesure, au lieu d'attendre d'avoir soixante textes au coin du bois et d'y passer ma semaine, envoyer mon article à une revue (déjà fait), rédiger un plan de thèse provisoire attraper mon directeur au vol pour lui parler de mon plan de thèse, poster plus régulièrement des notes de blog, manger correctement et, le grand classique, faire du sport.

Oui, faire du sport. Disons-le tout de suite, je ne suis pas une grande sportive. Mais j'ai fait de la danse un certain nombre d'années et je sais parfaitement combien il est bon de pouvoir se défouler périodiquement. J'avais repris en arrivant à Paris, j'ai réussi à tenir pendant l'agrèg', puis je me suis légèrement foulé une cheville, j'ai fait l'autruche parce que c'était l'année du spectacle, je le paye encore plus ou moins (conseil personnel : soignez-vous dès le début s'il vous arrive quelque chose de ce genre, sinon vous vous le traînerez pendant des années).

Ensuite, j'ai déménagé assez loin de Montrouge, je n'ai pas cherché une autre école de danse, la thèse est devenu un bon prétexte pour ne rien faire. L'année dernière, j'ai quand même acheté un maillot pour aller à la piscine, je suis passée à l'acte deux ou trois fois.

Donc, cette année, j'ai rapatrié mes baskets de ma cambrousse et annoncé fièrement à Chéri que j'allais courir. Chéri était en train de rédiger son M2, m'a vue en jogging-baskets, a commencé à se marrer et m'a répondu : "Vas-y, je reste, j'ai du boulot." L'important, dans la vie, c'est d'être soutenue.

Je suis donc allée cracher mes poumons et inquiéter les passants avec ma respiration de fausse asthmatique. Quand je suis rentrée, toute fière de moi, je me suis rendue compte que je n'étais partie que 20 à 30 minutes. L'important, dans la vie, c'est de persévérer (et de se fixer des objectifs atteignables).

Depuis ce matin, donc, je douille grave ma race, malgré mes étirements soigneux d'hier soir. Comme quoi, ça m'apprendra à bouger mon popotin et à prendre des bonnes résolutions. Ça me rappelle une autre rentrée, où, après avoir repris la danse et être passée par un après-midi de stage pré-reprise, j'avais tellement de courbatures que monter et descendre des escaliers, en particulier, était particulièrement pénible. J'y allais donc tout doucement pour affronter les marches de la bibliothèque d'Ulm, jusqu'à ce que j'arrive à la hauteur d'une chercheuse assez âgée qui m'a demandé : "Tiens ? vous aussi ? arthrose ?"

L'important, dans la vie, c'est de s'écouter.