dimanche 4 juillet 2010

Tout a une fin !

Et voilà, ça y est, j'ai quitté l'internat de l'ENS...

J'avoue, j'ai détesté la première année à Ulm : j'étais dans le nouveau bâtiment qui longe la rue Rataud, surnommé "le Bunker", en béton armé, pas repeint, avec des fenêtres anti-suicide qui s'ouvraient à peine de dix centimètres, d'où une atmosphère plus qu'étouffante en été, y compris pour quelqu'un qui, comme moi, ne craint pas le chaud. Ajoutez à cela des voisins que je ne voyais ni n'entendais jamais, sauf à la crasse immonde qu'ils laissaient dans les douches communes et dans la cuisine (j'en suis arrivée à me lever à 6h en semaine pour être la première à prendre ma douche, parce que, à 6h30, une fille réussissait à mettre de l'eau partout, y compris sur le plafond... Je me demande encore comment elle faisait) et lors des beuveries organisées périodiquement dans la cuisine (aaaahhh... les soûlards dans le couloir jusqu'à 4h du matin et le vomis dans la cage d'escalier après la soirée de Noël...!).

Heureusement, tout n'a pas été mauvais dans cette première année. J'y ai en particulier rencontré des gens géniaux, qui sont devenus des amis et avec certains desquels j'ai ensuite habité pendant deux ou trois ans à Montrouge. Et, là, c'était super : trois ans de fête, d'échanges entre littéraires et matheux, de fous rire, de conversations qui partent en vrille en deux minutes (à 3h du matin et avec un petit coup dans le nez, la chanson d'"Aladin", "Ce rêve bleu", devient une révélation de refrain cochon : quand je pense que je la connaissais par coeur étant petite !) et la mise en place des Fameuses Soirées C2, à coup de punch, de buffet gargantuesque (aaaaahhh... la dinde aux marrons de la première année... aaahhhh... la cuisinière qui nous lâche le jour de la fête de Noël la deuxième année... aaaahhh... les tartes poires-chocolat de mon voisin la troisième année...) et de pictionary chilien (c'est comme L'Automne à Pékin, aucun rapport ni avec le pictionary, ni avec le Chili). J'y ai acquis une réputation de leveuse de coude à l'esprit tordu, partiellement imméritée, mais qui n'est pas totalement fantasmée non plus (pas ma faute si je suis tombée dans la marmite freudienne étant petite et si la moitié de mes gênes est estampillée "brezhoneg" !).


(Paquebot "Paris" ; source : Wikipedia Commons)


Je dois cependant aussi reconnaître que, même si je sais que je vais regretter de ne plus être à cinq mètres à tout casser de mes amis et que ce sera un peu bizarre de me retrouver totalement on my own, je suis quand même aussi bien contente de m'en aller. D'abord, à 25 ans, l'internat, c'est sympa, mais, franchement, je pense que je suis définitivement trop vieille : les toilettes sans PQ, la cuisine immondément bordélique et dégueulasse, ça va un temps, à la fin c'est vraiment pénible. Et puis bonjour l'intimité quand mon copain est là (sans compter que, à deux dans un lit une place, c'est comme la cuisine dégueulasse, il y a mieux).

Mais bon, le C2 n'est pas mort !!! Pour finir en beauté sur l'Antiquité, dans un célèbre passage des Histoires d'Hérodote (historien grec du Vème siècle avant J.C., ayant écrit sur les guerres entre les Grecs et les Perses, de 499 à 479), Thémistocle, un grand homme politique athénien, cherche à convaincre se concitoyens d'abandonner la ville, qu'il était alors impossible de défendre devant l'armée du Grand Roi Xerxès : il leur explique alors qu'Athènes, ce ne sont pas des maisons, ce ne sont pas des temples, c'est le peuple athénien ; là où est ce peuple, là est Athènes. C'est la même chose pour le C2 : le C2, ce ne sont pas ses chambres, sa cuisine et son frigo, ce sont les personnes qui y ont habité (ou qui y ont beaucoup usé leurs fonds de culotte), qui y ont créé quelque chose ensemble et qui sont liées par des souvenirs communs. Le C2 will donc live forever et il y aura certainement des tentatives pour continuer les repas kolkhoze du mercredi dans nos nouvelles cages à lapins !

Et puis, surtout, ce blog n'est pas prêt de s'arrêter, que j'arrive à avoir une bourse de recherche ou que je me retrouve à faire mon stage d'agrèg' l'an prochain. Comme ça, la personne qui est arrivée ici en tapant "sale faignasse prof lettres classiques" sur Google aura de l'eau à apporter à son moulin ! :p

(Thémistocle ? ; source : Wikipedia Commons)

1 commentaire:

  1. Je vois que le NIR (nouvel immeuble Rataud), que j'ai vu construire à la place du Pavillon, est maintenant surnommé le Bunker. L'accès aux salles de réunion en sous-sol est particulièrement oppressant, impression d'être dans Doom ou Quake en vrai.

    J'ai une fois eu la surprise affligeante de voir ce bâtiment porté aux nues dans une exposition à la Cité de l'architecture. Enfin, je ne devrais pas être surpris, tant les critères de qualité adoptés par les spécialistes pour juger de la valeur architecturale des bâtiments semblent différents, voire opposés, de ceux des usagers.

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